Il est encore temps de féliciter Isaias Afwerki pour ses 30 années passées à la présidence de l’Érythrée. Un des rares États avec la Corée du nord a avoir institué l’esclavagisme militaire au sein de sa propre population. Un service militaire obligatoire (pour les garçons comme pour les filles) à durée indéterminée.
On y pratique des systèmes de co-surveillance (obligatoire là aussi) généralisée, à la manière des polices secrètes des ex-Pays- de l’Est, la détention la plus arbitraire, dans des conditions qu’on imagine fort bien. Un pur régime de terreur. À quelques heures en avion de la Méditerranée.
Sans oublier un taux de pauvreté, et des conditions de vie effarantes. (la liberté d’expression, j’imagine que les habitants ne savent même pas en quoi ça pourrait consister)
Raisons pour lesquelles les érythréennes et érythréens fournissent régulièrement un fort contingent de migrants vers l’Europe (et donc dans les camps d’internement aux frontières et à l’intérieur de notre ignoble forteresse.)
Mais les Européens se fichent complètement du sort des habitants de cette ancienne colonie Italienne (déjà soumise à rude épreuve alors).
Isaias Afwerki est aussi très pote avec Vladimir Poutine (on voit bien pourquoi)
On peut lire tout de même quelques ouvrages importants sur ce pays « passé sous silence dans les consciences européennes ».
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Concernant l’histoire récente et la manière dont Afwerki a conquis le pouvoir :
Le livre de Martin Plaut, Understanding Eritrea (2è édition révisée en 2019) (M. Plaut est un spécialiste de la corne de l’Afrique, et tient un blog très intéressant d’ailleurs : https://martinplaut.com/category/horn-of-africa/eritrea/ )
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Très complémentaire du premier, le livre de Jennifer Riggan, The struggling state : nationalism, mass militarization, and the education of Eritrea (2016)
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J’avais lu dans le volume : Affective States. Entanglements, Suspensions, Suspicions, Edité par Mateusz Laszczkowski and Madeleine Reeves, un excellent article de David Bozzini « The Fines and the Spies. Fears of State Surveillance in Eritrea and in the Diaspora », qui montre comment les diaspora érythréennes, celles et ceux qui ont réussi à fuir le pays et s’installer en Europe, aux États-Unis ou ailleurs, vivent encore dans la crainte de la redoutable police secrète d’Afwerki (qui tient les exilés en menaçant leur famille restée au pays).
Je conseille d’ailleurs très fortement ce volume, qui mène des réflexions très pertinentes à mon sens concernant notre « relation affective » à l’État (ou la manière dont l’État s’incarne, se réalise au fond, dans l’empreinte « affective » qu’il creuse en nous, pour le meilleur (pas souvent) et pour le pire (plus souvent).
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J’ai relevé celui-ci également, en Français, mais je ne l’ai pas lu (mais il a l’air très bien !) :
Érythrée, un naufrage totalitaire
de Jean-Baptiste Jeangène Vilmer et Franck Gouéry (2015)