Suite à l’épisode de la Méthode Scientifique sur les prochaines pandémies :
https://www.franceculture.fr/emissions/la-methode-scientifique/pandemies-la-menace-fantome
Pour comprendre le problème, écoutons Serge Morand : “en 1997, il y a avait 200 milliards d’oiseaux sauvages. Ils ne sont plus aujourd’hui que 40 milliards, et, face à eux, il y a 30 milliards de poulets.” Même sans être spécialement au courant de la manière dont fonctionne une zoonose, on peut de manière intuitive se faire une idée de la manière dont la perte de la biodiversité et l’émergence de maladie transmissible à l’homme sont liées : ce “face à face” entre le sauvage et le domestique favorise des variations virales susceptibles d’affecter in fine les humains.
Je note la remarque très juste de Marisa Peyre concernant le paradoxe de la prévention : c’est de continuer à payer quand il ne se passe rien. Pour prévenir la diffusion des pandémies à venir, on peut mettre en place un système de surveillance autour des zones à risques, les territoires “liminaux” – particulièrement ceux où les animaux sauvages sont en contact avec les animaux domestiques ou d’élevage, surveillance engageant des chercheurs mais aussi les populations locales. Mais le problème, c’est de maintenir ces dispositifs sur une longue durée, quand il ne se passe rien (c’est-à-dire tant que la prévention fonctionne).
J’ajouterai que c’est encore plus incertain dans des territoires qui subissent une instabilité politique notoire, notamment en Afrique Centrale. Une épidémie “prévenue” en amont n’existe pour ainsi dire pas du tout pour des décideurs politiques dont le mandat court sur quelques années, et c’est la même chose pour les opinions publiques.
Autre remarque : ce sont les pays riches, principalement, par leurs besoins croissants en ressources minières, pétrolifères et en bois, qui sont en dernière analyse responsables de la déforestation, que ce soit en Afrique, en Asie ou en Amérique Latine. Et du réchauffement climatique. En repoussant sans cesse les frontières entre les territoires où se situent les réservoirs des virus, le risque de voir certains de ses virus muter et se transmettre à l’homme par voie animale s’accentue.
C’est en ce sens qu’on peut dire, comme pour le changement climatique, que les modes de vie des habitants des pays riches (et des autres dans une moindre mesure) et les besoins en ressources naturelles que ces modes de vie impliquent, sont responsables de l’émergence de pandémies.
De fait, une politique idéale de prévention des prochains pandémies épouserait à quelques détails près les politiques imaginées pour freiner les effets du changement climatique. Comme ce n’est pas demain la veille que les sociétés occidentales vont se résoudre délibérément à modifier drastiquement leur manière prédatrice “d’habiter le monde”, il ne reste plus qu’à se terrer dans un fatalisme de rigueur et attendre la prochaine pandémie et les autres joyeusetés promises par le réchauffement du climat.