Le sixième rapport du GIEC est en train de sortir. la version définitive est prévue en fin d’année (2021, voire début 2022). En réalité, une série de publications dont l’épaisseur dépasse les 4000 pages, en anglais, de quoi occuper de nombreuses soirées d’été. On notera que, comme à l’habitude, un volume entier est consacré à l’exposé des méthodes (mesures, statistiques, modèles de prévisions etc). C’est pas des rigolos les chercheurs et les chercheuses là !
On trouve déjà des résumés en français (en fait des synthèses de synthèse : deux pages tout au plus), dans certains médias (qui confondent d’ailleurs brouillon et version définitive)
C’est très intéressant de se rappeler les premiers rapports du GIEC, il y a 30 ans et de comparer avec les plus récents. À chaque fournée, le ton se fait plus apocalyptique. En 1990, les scientifiques pouvaient encore nourrir de l’espoir que le changement climatique soit, sinon réversible, du moins contenu. Le Cinquième rapport (en 2014) constatait déjà avec un certain fatalisme que la question n’était plus de savoir si la catastrophe allait avoir lieu ou pas mais quand. Mais on préconisait encore des mesures pour freiner les processus en cours.
Aujourd’hui, en 2021, les effets de la catastrophe sont déjà largement observables dans de nombreuses parties du monde. Absolument rien n’a été fait pour répondre aux préoccupations des chercheurs. Et surtout, on est entré dans une nouvelle ère : j’en ai déjà parlé il y a quelques années, en disant qu’on finirait par sortir de l’anthropocène à proprement parler, dans la mesure où les processus enclenchés, les fameux tipping points (points de basculement), allaient relâcher immensément plus de Co2 et de méthane que toutes les activités humaines réunies. C’est un des thèmes récurrents dans les tables des matières de ce nouveau rapport : la fonte des banquises, du pergélisol, la déforestation, les incendies, la montée du niveau des océans, la désertification, la destruction des barrières de corail et j’en passe, sont des phénomènes qui, dès lors qu’ils sont démarré, sont probablement irréversibles – c’est-à-dire qu’ils se déploieront quoique l’humanité fasse.
Bref. On ne va pas y couper, ou plutôt, on est déjà en plein dedans.
La seule manière de limiter des dégâts, c’est de transformer l’économie mondiale et les rapports entre les états de manière considérable. Sortir du capitalisme prédateur, de la concurrence impitoyable pour la captation des ressources, du colonialisme, et inventer une gouvernance internationale fondée sur des vertus de solidarité et de coopération à grande échelle. C’est évidemment parfaitement utopique dans la mesure où triomphent un peu partout la xénophobie, l’individualisme, l’exploitation des populations les plus pauvres, l’extension de la misère et des famines, la captation des richesses par une minorité, et j’en passe.
Et, comme je le répète à longueur de temps sur mon blog, et c’est pas d’hier, NOUS NE SOMMES PAS TOUS DANS LE MÊME BATEAU. Les habitants des pays riches et tempérés s’en sortiront probablement beaucoup mieux que tous les autres. Comme d’habitude. Les premiers sont responsables historiquement du changement climatique, et ils sont aussi responsables d’avoir maintenus les pays les plus pauvres dans la misère. Et c’est pas prêt de changer.
Il y a vingt ans, quand je saoulais tous mes amis et proches au sujet du climat, on me traitait de paranoïaque – j’aurais aimé qu’ils aient raison, mais désormais, ma paranoïa d’il y a 20 ans, c’est une aimable plaisanterie quand on lit les inquiétudes et l’angoisse des scientifiques qui publient cette année le 6ème rapport du GIEC. Ça n’empêchera pas la plupart des gens de s’en foutre, et certains de considérer que c’est du pipeau. Un truc de média.
De la lecture donc (ici par exemple le volume “Climate Change and Land” qui date de 2019 – chaque chapitre est accessible au format pdf). Je ferais des compte-rendus de lecture au fil de cet été.
https://www.ipcc.ch/srccl/