Sanctuarisation, “Solutions fondées sur la nature”, Credit Carbone, Accaparement des terres, Racisme et Colonialisme

A section of Kenya’s Mau Forest complex that has been cleared for human settlement. Roberto Schmidt/AFP via Getty Images
The Continent, Ruto’s carbon dream is a nightmare for the people of the forest, 4 février 2024.

Je traduis ici un extrait d’un article de The Continent sur un énième projet de sanctuarisation d’un espace naturel dans le cadre du marché des Credit Carbone, ici au Kenya, et l’habituelle expulsion des populations qui y vivaient et en vivaient (de la forêt). Ça se passe un peu partout dans le monde (avec l’aval de pas mal d’ONG d’ailleurs, et d’une bonne des occidentaux “éclairés” – résultat d’une vision purement environnementaliste de la catastrophe climatique – sanctuariser la nature pour la protéger des exactions des sauvages ignorants et attardés : certains courants de l’écologie ne sont pas exempts de biais racistes et colonialistes.)

Il s’agit bien évidemment et seulement de business. Des compagnies comme Blue Carbon, émanation des Émirats Arabes Unis, extraient des capitaux et accaparent des territoires entiers, avec le soutien des dirigeants locaux (ici le Président Ruto), pour garantir le droit à polluer de compagnies extractives et industrielles toxiques.

 

 

“Le rêve de carbone de Ruto est un cauchemar pour les habitants de la forêt.

La migration forcée menace le peuple Ogiek alors que les écologistes occidentaux et les négociants en crédits carbone du Moyen-Orient s’emparent des forêts kenyanes.”

“Lors du premier sommet africain sur le climat en septembre, M. Ruto a clairement indiqué qu’il considérait le changement climatique comme une opportunité commerciale.

“Nous devons voir dans la croissance verte non seulement un impératif climatique, mais aussi une source d’opportunités économiques de plusieurs milliards de dollars que l’Afrique et le monde sont prêts à exploiter.

Le mois suivant, la société Blue Carbon LLC, basée à Dubaï, a déclaré avoir signé un accord sur les crédits carbone avec le Kenya pour “des millions d’hectares”. Il est difficile de savoir si la forêt Mau est incluse dans cet accord – le document officiel n’a pas été rendu public et aucune des deux parties n’a répondu aux questions.

Toutefois, M. Ruto a prononcé son expulsion trois semaines avant l’annonce de la société de Dubaï.

Alex Kisioi, membre de l’Ogiek Peoples’ Development Programme, soupçonne que l’expulsion actuelle est liée aux crédits carbone. “Nous ne sommes pas des délinquants forestiers, nous sommes des gardiens. Ils nous accusent à cause des crédits carbone”.

Fondée par un membre de la famille royale des Émirats arabes unis, le cheikh Ahmed Dalmook Al Maktoum, Blue Carbon existe depuis à peine un an et n’a aucun antécédent en matière de conservation.

Mais elle contrôle déjà une zone plus vaste que le Royaume-Uni, comprenant un cinquième du Zimbabwe, un dixième du Liberia et de la Zambie et de vastes étendues de la Tanzanie, après avoir vendu à la classe politique son modèle commercial de crédits de carbone.

C’est loin d’être le seul intérêt capitaliste pour les terres indigènes. Le village de Sasimwani se trouve à l’intérieur des 60 000 hectares revendiqués par la société néerlandaise IDH, qui affirme travailler avec des plantations de thé pour conserver la forêt de Mau.”

continent.substack.com/p/rutos

 

Notons que la forêt de Mau, et ses habitants, au Kenya, ont déjà payé un très lourd tribut dans l’histoire coloniale et néocoloniale à l’intérêt que lui portent les acteurs du capitalisme néolibéral comme le rappelait cet article de The Conversation.

 

Pour en savoir plus sur Blue Carbon, des UAE :

“Blue carbon deploys emerging strategies in the context of country de-carbonization using only methodologies that focus on compliance markets. We are committed to help businesses and government utilities to define their sustainable frameworks to help transit to a low carbon economy and reach their Net Zero goals in compliance with the transferability of credits under Article 6 of the Paris Agreement.

We help to accelerate sustainable development through transformation strategic investments and through our bilateral relationships we foster environmental economic development and advances sustainability. Our vast industry experience allows us to benchmark data and drive economic opportunities and growth for our stakeholders.”

Des projets qui se déploient sur le continent Africain, mais aussi en Papouasie Nouvelle-Guinée.

L’ONG Survival International travaille sans relâche pour informer sur les exactions commises envers les populations autochtones dans le cadre de ces sanctuarisations attachés au marché des Crédits Carbone. On peut suivre leurs travaux et leurs actions sur leur site.