Que reste-t-il à dire quand tout est raconté ? Il y a un crime et ce crime interpelle ses signes avant-coureurs, compose sa linéarité, énonce sa pathologie, renferme en lui-même sa nécessité, lisse, réifiée, officielle.
Quand tout est raconté par avance, il reste à dire ce qui déborde, ce que ne peut saisir le récit d’une vie livré derrière les portes du prétoire, de la prison, de l’hôpital. Il reste à entendre cette autre fatalité, discontinue, heurtée, subreptice. L’histoire de quelqu’un qui s’époumone à courir après sa folie, s’y étouffe, soupire encore.
C’est à l’accusatif que la folie met en demeure la raison qui voudrait la recouvrir. Sous la plume de l’auteur les images déplacent, le brutal se donne avec distinction. Un texte qui déroute sans égarer, histoire de voir ce qui s’ouvre en marge du convenu.
Julien Sterck
Lisez les 3 premières pages du livre en cliquant ici
Critiques
David était l’ Auteur du mois en octobre 2020 sur le site litzic.fr, retrouvez tous les articles ou entretiens qui lui ont été consacrés en cliquant ici et en suivant les liens de bas de page.
La critique de Faillir sur le site Litzic est à lire ici.
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Sur RadioActiv’ l’émission Bande Originale de Livres du 05/10/2020 était consacrée à ses livres, vous pouvez l’écouter ici
Sur RadioActiv’ l’émission Bande Originale de Livres du 07/10/2020 proposait un entretien avec David Fonseca à écouter ici
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Le site lelitteraire.com, propose un entretien avec David Fonseca à retrouver ici et un article à propos de Faillir à lire ici
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Article à propos des deux romans de David sur le blog de l’art helvétique contemporain à lire ici
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À aucun moment je n’ai lu ce livre en pensant qu’il s’agissait d’une biographie du frère racontée à la première personne, pas plus que d’un dialogue avec un psychiatre dont on n’entend jamais la voix et dont les réactions sont interprétées. Pour moi, dès le départ, j’ai été persuadée que c’était bien David Fonseca qui parlait et qui, dans le but de se mettre à la place de son frère de manière fictive, tentait de prendre sa part de ce qu’il avait fait. Il a écrit sa version, sa perception, sa conviction, à partir des faits dont il avait la connaissance, lui ayant été suffisamment proche pour pouvoir le faire.
Pour moi donc, c’est bien l’auteur, qui à sa manière, essaie par ce biais de s’approprier l’inadmissible, en faire sa chose et ainsi, la rendre pour lui acceptable, supportable. Pour s’en décharger partiellement, pour que ce soit moins lourd. Le papier imprimé devient un support, un étai. C’est l’aîné qui, dans une nécessité à laquelle il n’a pu se soustraire, tente par l’écriture cette exploration du continent mystérieux où s’est égaré son frère, et il le fait avec ses armes à lui, sa connaissance et sa maîtrise impressionnante de la langue, sa capacité de la plier à sa volonté, sa culture littéraire, philosophique, artistique et sociale. Le choix de cette litanie d’auteurs n’est pas innocent. La culture est ici un garde-fou, elle est brandie sans retenue, presque exaltée, comme si chaque auteur cité permettait d’ajouter une pierre au rempart qu’il tente d’édifier entre l’acte de son frère et sa propre existence. D’où ce texte saturé de mots torturés, déviés, violentés, broyés et reconstitués dans leur sens et dans leur consonance, ce texte débordant de références enchaînées, de noms d’écrivains qu’il met dans la bouche de son frère (ou dans sa pensée, car le psychiatre supposé n’a pas beaucoup d’épaisseur et de réalité) déversant un trop-plein culturel volontairement invraisemblable, pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté, qu’on sache bien ce qu’il en est en réalité, c’est David qui parle, c’est David qui écrit, qui déroule pour le lecteur ce parcours dont il a dû être le témoin obligé, ligoté familialement, qu’il tente de communiquer, d’analyser, d’exorciser. Une tentative de se mettre dans la peau, dans l’esprit et dans les obsessions de son frère, de pénétrer ses parts obscures par l’alchimie de l’écriture. Le livre achevé, il aura endossé à sa façon une part du crime, il aura participé au tourment (et à celui des victimes, dont il est très peu question néanmoins) ce crime qui, après avoir été suspendu au-dessus de la tête du lecteur pendant 124 pages, explose brutalement et fait pleuvoir ses retombées jusqu’à la fin du livre.
Le ressassement exaspéré et exaspérant du mot crime et les invectives au prétendu psychiatre participent au malaise nauséeux de toute cette affaire ou rien, jamais, ne semble pouvoir basculer du côté positif, pas même la culture levée ici comme autant de boucliers inutiles et non salvateurs.
J’ai été, comme absolument toutes les femmes, confrontées dans ma vie à la violence masculine, en tant que concernée ou témoin, et il ne m’est donc pas facile de considérer de façon objective le sujet, d’autant que dans ce livre, le côté féminin est laissé complètement de côté. Il n’est que le révélateur, le déclencheur. (…)
Pour conclure, la lecture de Faillir, en plus d’être ce qu’elle est, une sorte de traversée périlleuse, jette un nouvel éclairage sur Cellules (p 162 et autres) et sur le thème de l’enfermement.
Sylvie Aubriot (France)