brève réponse au sujet du loup suite à une tribune dans l’Humanité

La tribune en question peut être lue ici :

http://www.humanite.fr/quand-le-loup-dicte-leur-conduite-aux-decideurs-politiques

Je recopie mon commentaire ci-dessous :

Ce texte aurait pu être publié à la virgule près dans Le Figaro ou repris mot pour mot par un Laurent Wauquiez par exemple, qui qualifiait récemment les écologistes d’Ayatollahs. Les écologistes sont forcément de salon, citadins, et le loup un « égorgeur de brebis », qui ferait diminuer la biodiversité en montagne (assertion totalement fausse ! L’auteur ne connaît manifestement pas grand chose au loup), ce qui évidemment ne facilite pas la discussion.

Il est totalement traumatisant pour un berger de voir l’état d’une brebis ou d’un troupeau entier après la visite du loup. Mais que préconisez-vous ? Une seconde éradication du loup dans notre pays ? Avec des chasseurs postés aux frontières avec l’Italie, la Suisse, l’Allemagne et l’Espagne pour les tirer dès qu’ils pénètrent dans le territoire national ? Bonne chance avec ça. Les difficultés rencontrées par l’élevage ovin ne datent pas, et vous l’admettez sans insister, du retour du loup dans les alpages. Quand bien même on parviendrait à éradiquer le loup, ça ne sauvera en rien l’élevage ovin : la vraie menace, et là c’est un argument qu’on ne lira pas dans le Figaro, c’est la pression des accords de libéralisation du commerce international. Sans oublier le fait, structurel, que les français ne consomment plus autant d’agneaux qu’autrefois – non pas qu’ils soient tous devenus végétariens, ou convertis à je ne sais quelle idéologie, mais parce que leurs poches sont vides.

Quant à l’appel aux politiques, rassurez-vous, il est largement entendu : la convention de Berne à laquelle vous faites allusion n’empêche pas notre ministre de l’environnement de multiplier les décrets autorisant les tirs administratifs, tirs qui n’ont aucun effet (parce que ces tirs sont effectués au hasard, et prélèvent souvent la bête la plus puissante de la meute, celle qui justement permet à la meute de chasser de grands ongulés sauvages plutôt que des brebis sans défense – s’il faut tirer, alors faisons-le en cas de flagrant délit, au moment où le loup attaque le troupeau – il existe des méthodes moins létales pour communiquer avec le loup à ce sujet et lui faire comprendre que les brebis ne sont pas pour lui, mais un tir effectué au bon endroit est en général très bien compris par la meute). Dans un monde meilleur, on prendrait le temps de mieux connaître et le loup et les brebis, et les grands ongulés, et les humains qui travaillent au milieu de toutes ces créatures. On lirait par exemple l’excellent livre de Baptiste Morizot, Les Diplomates, publié récemment aux éditions WildProject, qui avance des propositions passionnantes pour améliorer cette cohabitation entre le pastoralisme et les loups.