Partager les vaccins

Adhanom Ghebreyesus, le directeur de l’OMS, infatigable, obstiné, criant pour ainsi dire dans le désert. « Nous avons un besoin urgent de renverser les choses : d’une majorité de vaccins allant dans les pays riches à une majorité allant dans les pays pauvres »
Il s’en prend ici aux pays qui ont d’ores et déjà l’intention de fournir une troisième dose à leurs habitants, alors que, dans le même temps, seulement 1,5 personne sur 100 dans les pays pauvres a reçu une dose de vaccin.
L’objectif fixé en mai était de vacciner cet été 10% de la population mondiale : on est loin du compte. Covax n’arrive pas à remplir sa mission faute de doses et n’a pu distribuer qu’une petite fraction de ce qui était initialement prévu. Sur les quatre milliards de ces doses injectées dans le monde, 80 % sont allées à des pays à revenu élevé ou moyen, alors qu’ils représentent moins de 50 % de la population mondiale.
Ils ont aussi un petit mot pour les labos qui au lieu de baisser le prix de leurs vaccins les augmentent. Bon. Que dire. C’est pas comme si l’industrie pharmaceutique avait perdu des sous dans cette affaire hein.
Il aurait pu ajouter, mais ce sera sans doute pour une prochaine fois, que la situation est critique dans bien des pays : en Afrique, certains pays subissent une vague qui sature les capacités hospitalières dans un contexte de pénurie d’oxygène (il est loin le temps où l’Afrique était réputée immunisée contre le virus). Au Pérou, et maintenant au Chili (un des pays les mieux vaccinés) un variant Lambda serait résistant au vaccin et fait exploser les cas de contamination. Il semblerait que le vaccin chinois Sinovac produise 10 fois moins d’anticorps que les vaccins ARN, mais, heureusement, protégerait tout de même efficacement des formes graves. En Indonésie, le Covid-19 affecte les enfants, pris dans un cercle vicieux, dans lequel la malnutrition et l’anémie les rendent plus vulnérables. Et en Inde, s’ajoute au Covid-19 une épidémie de mucormycose (à ne pas confondre avec le champignon noir, qui existe également, et n’est guère plus sympathique), une vraie saloperie aussi.
Et pendant ce temps là, chez nous, blablabla.
Y’a un moment, cette histoire de partage de vaccins, c’est même plus une question de morale ou d’humanisme, mais de calcul purement pragmatique. Si on n’est pas capable de partager par humanité, faisons-le au moins par utilité je sais pas quoi..