Note du soir : la relation est première

En me promenant avec mademoiselle Iris de la Loupette ce soir à la fraîche, je me suis dit qu’en définitive, tout ce sur quoi je travaille, ma littérature, les séances de psychanalyse avec mes patients, mes excursions dans le domaine de l’anthropologie et bien d’autres choses encore, tout cela pouvait être ramassé dans une sorte de formule du genre :
La relation est première. Les termes de la relation (qui nous sidèrent et nous obsèdent en même temps qu’ils nous ancrent) sont précaires et incertains, et pour tout dire des émanations (banales ou fulgurantes) de la relation, des symboles et des abstractions (nécessaires sans doute à l’existence humaine, mais d’une épaisseur ontologique forcément suspecte).
Ça n’a rien de nouveau : Héraclite le disait probablement déjà, du moins ce Héraclite recomposé par Platon et Aristote à des fins polémiques et métaphysiques.
Je me suis dit aussi : au fond, rien d’étonnant à ce que la xénophobie soit le type de relation au monde (la manière d’habiter le monde) qui me paraisse la plus irrationnelle, et la plus effrayante.
Et, d’où me venait donc cette intuition du soir ? Évidemment de la lecture d’un message, ramassé comme il se doit en quelques mots, après tout il est passé maître en ce domaine, de Monsieur Rhésus, ci-devant Robert Hébert, qui évoquait ses premières amours pour Alfred North Whitehead, penseur radical de la relation s’il en est !
(et pour en revenir à l’actualité : nos corps sont des melting pot de virus, de bactéries, et de millions d’entités qui se fichent bien de notre identité, nos manières d’habiter le monde les résultats de brassages génétiques fabuleux, d’histoires croisées parfaitement improbables, et nos pensées sont condamnées à mourir, n’être que des rabâchages et des idées rances si elles n’accueillaient pas les mots de l’étranger.=