“La liberté va redevenir la règle, l’interdit, l’exception.”

La règle exige que vous soyez libres à nouveau, comme avant. Donc bordel : soyez libres ! (enfin, en respectant tout de même un certain nombre d’interdits, et en suivant la règle, la règle de la liberté, je veux dire, hein, c’est pas qu’on vous enjoigne de faire nimporte nawak non plus, faut pas pousser, qu’on me comprenne bien, putain qui est le sous-fifre qui m’a pondu un slogan pareil, je reprends : avant donc, vous étiez, disons, libres, enfin, dans les limites prescrites par la loi, hein, faut pas déconner non plus, mais bon, il y a eu ce virus, ok, alors pendant l’épidémie, on était tenu de faire attention avec cette liberté hein, je veux dire, à cause de la contamination quoi, mais maintenant que le virus c’est fini, enfin, soyons prudents, c’est peut-être pas tout à fait fini mais grâce, je tiens à le dire et à remercier heu, des tas de gens, grâce au sacrifice de nos libertés justement, et grâce à la manière dont nous nous sommes soumis volontairement aux interdits, hé bien, voilà, le cauchemar est derrière nous, je veux dire, probablement qu’il est derrière nous, on n’est pas bien sûr, mais quand même, on va pouvoir maintenant reprendre une vie normale, une vie libre, et donc faire des tas de choses que, voyons, des tas de choses libres quoi, je ne veux évidemment pas dire, amenez-moi ce stagiaire qui a pondu ce discours bordel, j’ai deux mots à lui dire, je ne veux pas dire qu’il n’y aura pas deux trois choses un peu interdites quand même, je n’ai pas la liste sous les yeux, non, mais la liberté ne signifie pas une licence absolue, non, c’est juste que les interdits deviendront exceptionnels, l’exception c’est cela, alors certes il y a de nombreuses exceptions, cela va sans dire, où irait le monde sinon, putain ramenez-moi ce stagiaire avec ses formules à la con)

Variante :

Vous étiez dans les fers et sous le joug (enfin, juste pendant deux ou trois mois) et maintenant, vous êtes libres !

Vous pouvez donc librement aller bosser chaque matin pour un salaire de merde, librement vous endetter pour élever vos gosses, acquérir cette voiture de merde et ce joli pavillon de merde au milieu d’une centaine de jolis pavillons de merde, tout en parpaings, qui vous fait tellement envie, vous pouvez de nouveau librement acheter à manger dans des supermarchés de merde, et redonner ainsi aux généreux pourvoyeurs qui vous ont fait l’aumône d’un salaire de merde ce que vous avez gagné à la sueur de votre front, afin de redresser librement l’économie de la France, et sa compétitivité de merde, et surtout contribuer librement au versement des dividendes des actionnaires et librement payer vos factures et rembourser librement vos dettes, vous pourrez d’ici peu librement remplacer votre smartphone de merde et passer à la 5G, afin de consentir librement à votre servitude numérique, vous pourrez même, si vous vous comportez librement comme un économiste avisé, partir un petit peu en vacances, et ce, en toute liberté, et surtout, vous allez pouvoir de nouveau accumuler librement des trimestres de retraite, pour, si vous êtes encore en vie à l’heure où vous pourrez enfin vous reposer un petit peu, accomplir librement les rêves de merde qui vous restent encore, s’il en reste, quand vous serez plus vieux, si vous êtes encore en état, et librement souscrire une assurance-vie si par miracle vous en avez encore les moyens, en essayant librement d’oublier que de toutes façons ce monde de merde devrait finir par s’écrouler dans les années à venir, et que tous ces projets librement conçus risquent bien d’être engloutis dans un déferlement de misère, bref, vous viviez sous d’innommables contraintes, privés comme nul autre homme dans l’histoire et sur la terre de libertés, mais le cauchemar est enfin derrière nous, et il est enfin l’heure de regagner le bien le plus précieux qui soit, la liberté.